Carnet de route
Grand pic d'Ossau par le couloir de la Fourche
Sortie : Couloir de neige du 27/03/2021
Le 28/03/2021 par Charlie Thiebault
Ca y est, on va pouvoir ouvrir le compteur des sorties d'alpinisme hivernal (bizarre saison, tout de même). Il fait beau, les risques d'avalanche sont au plus bas, ça va être le top.
Pour une fois, nous avons décidé de partir assez tôt dans l'après-midi de Bayonne avec Pascal et Oriane (d'habitude, on est jamais très loin de sortir la frontale pour arriver au refuge de Pombie !). Bien nous en prend car arrivés vers 17h il y a déjà 10 personnes au refuge. Pas assez de matelas ? Qu'à cela ne tienne, on prendra des couvertures qui les remplaceront efficacement. Puis la chose se complique quand 2 groupes de 2 arrivent. Cher lecteur, je vais vous demander un petit effort : question 1 : combien font 10+3+2*2 ? N'oubliez pas les priorités opératoires, je ramasse les copies dans 1h.
Nous nous organisons une petite séance entraînement ARVA à coté du refuge puis rentrons manger (enfin apéro dînatoire comme dans toute bonne soirée entre amis) histoire de laisser la table libre pour les autres. Vers 20h30, 4 randonneurs arrivent à leur tour. Question 2 : combien sommes nous maintenant ? Si vous avez trouvé 21 vous avez tout faux car les 4 derniers arrivants rebroussent chemin vu qu'il n'y a même plus de place pour dormir par terre . Joyeux bordel !
Je vous laisse imaginer la nuit de rêve où le meilleur moment a encore été le salvateur ding ding du réveil à 4h45 heure d'été (ah oui, pour compliquer l'affaire il a fallu jongler avec ce changement d'heure.)
Le couloir de la Fourche est avalé en 2h, la neige porte bien et l'optimisme règne. Une petite pause pour refaire le plein d'énergie, admirer le lever de soleil d'un coté et le coucher de la lune de l'autre et c'est reparti pour le sommet de l'Ossau. Les choses commencent à devenir plus sérieuses, passage de la dalle grise en crampons puis on trouve du mixte rocher glace pourrie juste au dessus. S'en suit des traversées en neige semoule plein gaz au dessus des abîmes versant nord. Puis des ressauts mixtes glace cassante/rocher plutôt techniques à surmonter, je suis content d'avoir pris les coinceurs ! Enfin nous débouchons au sommet de la pointe d'Espagne, il est 11h15. Le temps est magnifique, pas de vent, il fait chaud, nous sommes seuls au monde. Après la pause déjeuner, il est temps de descendre. Il va falloir être très vigilant, les pentes sont raides et exposées et la neige est pourrie en profondeur. La moindre zipette de l'un d'entre nous et nous réussirions alors une des descentes les plus rapides et les plus directes de l'Ossau.
Alors que nous arrivons en bas du rein de Pombie et nous apprêtons à désescalader la 1ère cheminée nous croisons 2 jeunes qui montent vers le sommet. Ils ont l'air très émoussés par leur ascension et nous demandent s'il n'y a pas une autre voie plus simple pour descendre. Après notre réponse négative, je sens un peu plus de détresse chez eux. Ils nous disent qu'ils vont se restaurer puis peut-être poursuivre vers le sommet. Nous les mettons en garde en leur disant que le sommet n'est pas à coté et que ça va leur prendre un bon bout de temps sans compter la descente à suivre. Puis nous poursuivons notre laborieuse descente dans une neige toujours plus pourrie et des pentes toujours plus raides. Nous prenons notre temps et assurons chacun de nos pas. Régulièrement nous devons effectuer des traversées ce qui est encore plus stressant que de descendre. Nous entendons alors l'hélicoptère arriver, je devine qu'ils viennent récupérer les 2 jeunes. Je suis soulagé car je les sentais bien mal embarqués pour effectuer cette descente sans prendre d'énormes risques. L'hélicoptère les treuille et les dépose au refuge, puis il fait une nouvelle ronde pour s'assurer que nous ne sommes pas en difficulté.
Avec une certaine lenteur mais méthodiquement nous parvenons enfin au pied de la paroi. Nous descendons au col de Suzon et voyons l'hélicoptère redécoller, je pense qu'ils attendaient de nous voir en bas avant de rentrer à la base, merci à eux.
Arrivés au refuge, nous prenons une petite pause. Le refuge est maintenant désert, quel contraste par rapport à hier puis nous refaisons les paquetages.
Une dernière question cher lecteur : avez vous déjà remarqué que les sacs diminuaient de volume au retour ? Tout ce qui rentrait dedans à l'aller ne veut plus au retour, toujours une veste ou un réchaud récalcitrant ou mal intentionné ! Si quelqu'un a une explication à ce phénomène physique (compression du volume avec l’altitude ? Ça ne me paraît pas très plausible ) qu'il me contacte, je serai curieux de savoir !
Voiture à 18h, et 1h plus tard nous devenons de dangereux contrevenants au couvre-feu ! Heureusement la maréchaussée n'est pas si méchante que ça, surtout si on ne la croise pas, ce qui a été notre cas .
